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Les bans des vendanges

Les bans, c’est quoi ?

En Champagne (et ailleurs en France), l’ouverture officielle des vendanges est traditionnellement appelée les bans des vendanges.

Origine ethymologique

Le mot « ban » vient du vieux français ban (issu du francique ban), qui signifiait proclamation publique faite par une autorité. Autrefois, un ban pouvait être :

  • un ordre du seigneur ou de l’autorité locale,
  • une interdiction ou une obligation proclamée à haute voix sur la place du village,
  • ou encore l’annonce officielle d’un évènement (mariages, corvées, récoltes, etc.).

👉 Ainsi, quand venait la période de la récolte du raisin, le seigneur ou plus tard l’administration publiait officiellement « le ban des vendanges ». Cela indiquait à tous les vignerons la date à partir de laquelle ils avaient le droit de commencer à couper le raisin.

En Champagne, cette pratique a perduré parce que la date d’ouverture des vendanges reste strictement réglementée par arrêté préfectoral, après avis du Comité Champagne. On conserve donc le terme traditionnel de bans pour désigner cette proclamation officielle.

Chronologie sur l’évolution des bans des vendanges en Champagne

📜 Moyen Âge (XIe – XVe siècles)

  • Le seigneur local (ou l’évêque, ou une abbaye) proclamait publiquement le ban des vendanges.
  • Personne n’avait le droit de récolter avant la date fixée.
  • Objectif : éviter que certains cueillent trop tôt (donc du raisin pas mûr) et protéger la qualité de la production.
  • Les contrevenants risquaient amendes, confiscation du vin… voire peines plus lourdes.
Droit de ban des vendanges cédé à Beaune par Eudes III de Bourgogne en septembre 1210.

⚖️ Époque moderne (XVIe – XVIIIe siècles)

  • Le système se généralise dans tout le royaume de France.
  • Le ban est crié sur la place du village par le crieur public ou affiché aux portes de l’église.
  • Cela devient un vrai événement communautaire : tout le monde connaît la date officielle.

Révolution & XIXe siècle

  • Les droits seigneuriaux disparaissent, mais la pratique perdure : les maires ou les préfets continuent de fixer et proclamer les bans.

  • En Champagne, avec l’importance croissante du vin mousseux, la régulation devient cruciale pour garantir une vendange homogène et mûre.

🍇 XXe siècle

  • Après la crise viticole et la création de l’AOC Champagne (1936), la fixation des dates de vendange est encore plus encadrée.
  • Le Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CIVC), créé en 1941, joue un rôle central : il propose les dates en fonction des maturités observées dans chaque cru.

🥂 Aujourd’hui

  • Chaque année, fin août ou début septembre, le Comité Champagne publie les dates d’ouverture des vendanges par commune et par cépage (voir image ci-contre).
  • Le préfet prend un arrêté officiel : ce sont les bans des vendanges.
  • La tradition du mot a survécu, même si ce n’est plus un crieur sur la place du village mais un document officiel (ci-dessous)

En résumé, les bans des vendanges viennent du temps où l’autorité seigneuriale proclamait publiquement l’autorisation de récolter. Aujourd’hui, en Champagne, le terme reste pour marquer le côté officiel, collectif et réglementé de l’ouverture des vendanges.

Cette année, les bans sont tombés le 20 août, ce qui est tard pour une vendange qui débute quelques jours après ! Sur notre secteur à Fleury La Rivière, le premier coup de sécateur peut être donné à partir du 25 août.

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La vigne en foule

Depuis le Moyen Âge, dans des régions viticoles françaises – y compris en Champagne – , les vignes étaient cultivées de façon désordonnée (pieds de vigne non alignés contrairement à aujourd’hui) et à une densité élevée (environ 50 000 à 60 000 pieds par hectare). Ce phénomène était désigné sous le terme de « vigne en foule » et nous avons reproduit cette façon de cultiver en bordure de notre siège d’exploitation (voir photo ci-dessous) pour pouvoir montrer cette méthode de culture ancestrale et séculaire à nos clients.

En réalité, les vignes étaient plantées en rangs à forte densité dès l’installation initiale (avec un espacement de 1 mètre par 0,80 mètre), et c’est le provignage/ marcottage 1 pratiqués chaque année qui aboutissaient à cette densité de 50 000 à 60 000 ceps par hectare, donnant aux vignobles cet aspect irrégulier.

Cette méthode, héritée du Moyen Âge, fut progressivement abandonnée : partiellement à la fin du 19ᵉ siècle, puis totalement au cours du 20ᵉ siècle, lors de la replantation des vignobles consécutive à la crise du phylloxéra2 et à l’apparition du mildiou et de l’oïdium, situations pour lesquelles il était nécessaire d’accéder aisément aux vignes pour les soigner efficacement au cuivre et au soufre, mais aussi de faire pousser les pieds de vignes de la façon la plus aérée possible.

Par ailleurs, le lien entre la densité de plantation et les profils aromatiques des vins est très modulable, puisque la typicité d’un vin ne dépend pas uniquement du nombre de pieds par hectare.


  1. Le marcottage est une méthode de multiplication des végétaux par la rhizogenèse (développement de racines) sur une partie aérienne d’une plante mère.  ↩︎
  2. Maladie de la vigne provoquée par un puceron microscopique. Elle est provoquée par un parasite de la vigne d’origine américaine et fit des ravages dans de nombreux vignobles de France, notamment en Champagne . ↩︎
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L’origine du vin : 8000 ans d’histoire

L’histoire de la découverte de la vinification remonte à des milliers d’années, et elle est enveloppée de mystère et de légendes.

Un heureux hasard

La découverte de la vinification est certainement le résultat d’un heureux accident. Il est probable que nos ancêtres, dans leur quête de nourriture, aient cueilli des grappes de raisin et les aient conservées dans des récipients naturels, tels que des jarres ou des peaux d’animaux, pour les transporter ou les stocker. Au fil du temps, les raisins ont commencé à fermenter naturellement en raison des levures présentes dans l’environnement, transformant le jus sucré en un liquide alcoolisé.

Les premiers producteurs de vin ont sans doute remarqué les effets de la fermentation et ont expérimenté différentes méthodes pour produire délibérément du vin. Ils ont probablement découvert que presser les raisins pour en extraire le jus avant de le laisser fermenter conduisait à un produit plus régulier et prévisible.

Origine géographique & datation

Les archéologues s’accordent à établir que la « culture du vin » a débuté dans la période comprise en -8000 et -4000, c’est-à-dire au Néolithique, dans les montagnes du Proche-Orient, quelque part entre la Turquie orientale actuelle et le nord-ouest de l’Iran.  

Paysage d’Anatolie (Turquie), région où s’est probablement déroulé le passage de la vigne sauvage à la vigne domestiquée. © M. Poux
Pépins de raisin datant du néolithique, retrouvés en Géorgie (Caucase)

C’est dans cette région que l’on rencontre la plus grande diversité génétique de la vigne, là aussi que, fort probablement, se produisit le passage de la vigne sauvage à la vigne cultivée. Des pépins de raisins ont été retrouvés sur de nombreux sites archéologiques, à la fois dans une forme sauvage et dans une forme caractéristique de l’espèce domestiquée. 

La vigne a certainement été importée depuis les régions montagneuses du nord, où l’on a découvert des jarres contenant des résidus d’acide tartrique.

Le vin provient dans un premier temps des régions montagneuses entourant les plaines de Mésopotamie, ensuite la Syrie et l’Arménie fournissent l’essentiel du vin consommé. Denrée chère, le vin était une boisson de luxe destinée aux souverains

Prémices de la vinification

Un texte du roi de Lagash évoque dès -2340 la construction d’une réserve abritant des jarres de « bière des montagnes », c’est-à-dire de vin. Le Code Hammourabi (vers -1750) en réglementera la vente. Mises au jour à Mari (ville située sur l’Euphrate en amont de Babylone), des archives datées de la même époque font état de son commerce et traitent de ses manipulations : transvasement, soutirage, sélection, filtrage, mélanges… Toutefois aucun des textes qui nous sont parvenus ne fait mention de culture de la vigne ou de procédés de vinification

Au fur et à mesure que les connaissances et les techniques se sont développées, la vinification est devenue une pratique plus sophistiquée, avec l’introduction de différents types de récipients pour la fermentation et le vieillissement, ainsi que des méthodes de contrôle de la fermentation et du processus de vinification dans son ensemble.

Bien que les détails exacts de la découverte de la vinification soient perdus dans les méandres de l’histoire, il est clair que cette pratique a joué un rôle important dans de nombreuses civilisations anciennes, de la Mésopotamie à l’Egypte, en passant par la Grèce et Rome.

Originaire donc du nord du croissant fertile, la vigne cultivée progresse vers le sud pour atteindre la vallée jordanienne vers -4000, l’Égypte et la Mésopotamie vers -3000, la Grèce vers -2500.

Extension de la viticulture à la méditerranée

Puis les grecs ont étendu de la vigne autour du bassin méditerranéen (Sicile petite Grèce, Etrurie, etc). L’implantation de colonies grecques à Bandol, Nice et Marseille a développé la vigne en France.

Implantation des colonies grecques en Méditerranée

Aujourd’hui, la vinification est devenue une industrie mondiale complexe et diversifiée, mais elle trouve toujours ses racines dans cette humble découverte accidentelle il y a des milliers d’années.



Article écrit après avoir recoupé différentes sources fiables dont celles de l'INRAP.
Pour aller plus loin, rendez-vous sur :
https://www.inrap.fr/dossiers/Archeologie-du-Vin/home