Littérature

Les très riches heures du Duc de Berry

berry-4b0562405fc4c-855-471L’ouvrage médiéval « Les Très Riches Heures du duc de Berry » est  un livre d’heures et un calendrier, commandé par le duc Jean Ier de Berry. Au sein du calendrier, au mois de mars, on y voit représentée la taille de mars.

Cette peinture représente une scène de travaux agricoles. Chaque champ contient une étape différente des travaux, tous séparés par des chemins se croisant au niveau d’un édicule appelé montjoie. Au second plan, des vignerons (ou closiers*) taillent et sarclent la vigne  en foule** avec houe et serpette dans un enclos à gauche et labourent le sol à l’aide d’une houe pour aérer le sol : ce sont les premières façons de cultiver la vigne.

©Photo. R.M.N. / R.-G. Ojéda
©Photo. R.M.N. / R.-G. Ojéda

En province, comme d’ailleurs en Bourgogne (sauf dans la région de Chablis) et dans le Jura, la vigne en foule présente avec ses ceps en désordre une apparence très particulière, déroutante pour qui est accoutumé aux vignobles dont les lignes sont tirées au cordeau. En réalité, pour établir la vigne en foule on plante en rangs réguliers espacés de 0,80 m à 1 m (selon la tradition, on arrose avec du champagne le dernier cep planté) mais ensuite on pratique deux opérations qui vont détruire petit à petit cette belle ordonnance, le provignage et l’assiselage. (Source : CIVC).

Cet ouvrage est commandé par le duc aux frères Paul, Jean et Herman de Limbourg vers 1410. Inachevé à la mort des trois peintres et de leur commanditaire en 1416, le manuscrit est probablement complété, par un peintre anonyme. Certains historiens de l’art y voient la main de Barthélemy d’Eyck. En 1486, il est achevé dans son état actuel par le peintre Jean Colombe pour le compte du duc de Savoie. Acquis par le duc d’Aumale en 1856, il est toujours conservé dans son château de Chantilly, dont il ne peut sortir, en raison des conditions du legs du duc.

*exploitants d’une closerie, petite exploitation rurale

** Vignoble planté sans ordre apparent et en grande densité (50000 à 60000 pieds par hectare en moyenne). Cette méthode ancestrale fut abandonnée au 20e siècle suite à la replantation du vignoble consécutive à la crise phylloxérique.

vigne

La brouette a feu, « compagne d’hiver du vigneron & pratique controversée.

Depuis les années 60, on utilise la « brouette à feu », dans laquelle est entretenue une flamme permettant de brûler sur place les sarments fraîchement coupés. Cet outil d’une simplicité désarmante a été conçu en 1964 par M. Michel Jeanneteau, constructeur en matériel viticole à Saint-Martin-d’Ablois.

Sa structure en fer a la forme d’une brouette ayant pour roue une jante de bicyclette et supporte un fût métallique de 100 à 200 litres, souvent un vieux fût à essence, disposé à l’horizontale, ouverte, avec les bords écartés à la verticale. La partie basse est percée de trous assurant le tirage du foyer et, et après utilisation, l’évacuation des cendres.

On allumait un feu dans la brouette et on y jettait les sarments au fur et à mesure qu’on les coupait, la déplaçant avec nous tous les deux ou trois ceps pour l’avoir toujours à proximité. On n’avait donc plus à procéder au ramassage des sarments et si nous éprouvions parfois quelque gêne à cause de la fumée, ou quelque peine à bouger la brouette par temps humide sur un terrain en forte pente, nous bénéficions en échange d’un chauffage appréciable, surtout en plein hiver lorsqu’il gèle en journée. Sur notre exploitation, mon père avait, dans les années 60, un « traineau » en métal pour évacuer les sarments :  Etant enfant, c’est moi qui aidait mon père en allant déposer les sarments en  tas, en dehors de la vigne. Nous les brûlions ensuite.

Depuis quelques années, le brûlage des sarments fait l’objet d’une interdiction, avec une tolérance les jours de faible pollution atmosphérique. La raison de cette interdiction porte également sur la déperdition de la matière organique brûlée, alors que celle-ci pourrait profiter au sol et à la vigne en étant broyée. Les sarments broyés au contact du sol forment une sorte d’humus. D’où le recours à moins d’engrais. Depuis mon installation sur l’exploitation, en 1975, nous broyons les sarments grâce à un broyeur attelé au tracteur (voir photo).

Patrice MARC